Errances vitales et Terres fertiles
Le corps éparpillé s’assemble en fines volutes charnelles, aux confins de la fluidité. Poussières de corps en poussières d’univers. Inouïs dessins d’âme, déliés, aventureux, aigus, et sans assise. NikiNeuts ensemence le vide. Le microcosme de l’intime rejoint le macrocosme du dehors, et ses blancheurs graphiques, sans cesse, éveillent l’opacité. L’extrême du noir et l’infini du blanc s’étreignent. Cet affrontement formel insidieux serre la gorge, quand la mort-vie s’abandonne à ses errances cruelles. NikiNeuts laisse en elle surgir ses improbables créations, ses saisissantes créatures, et ses taches vitales, superbes d’impact formel, qui accidentent l’étendue. Une cellule matricielle s’auto-engendre, bouscule ses limites, et envahit les surfaces, comme une goutte de vie aux allures de cosmos qui s’étendrait sans limite. Saisies quasi instantanées de ces possibles épanchements. Comme si le commencement du monde et les prémices de l’existence ne faisaient qu’un. Chaque œuvre est île virtuelle, trace d’être, et vie passante d’indicible fragilité. La normalité pétrifiée a fui. Cartographie aérienne, venteuse, éperdue, et poignante. Indicibles métamorphoses de la précarité. La matière des œuvres de NikiNeuts serait plutôt une anti-matière affleurante et secrète, vouée à l’absence plus qu’à la présence. Chaque œuvre est marquée d’émotion crue, dure, sensible, et fatale. Ce sont les nappes phréatiques de l’intime nudité, et ses sublimes secousses telluriques, que peint NikiNeuts, dans une tragique et subtile érotique des profondeurs.
Texte de Christian Noorbergen – Critique d’art – Exposition «Terres fertiles» – Troyes, galerie Passeart – 2015